🇧🇷 Brésil : la réémergence des cultes afro-indigènes dans l’espace public

Une réappropriation culturelle face au rouleau compresseur évangélique

🪶 Le retour de ce qui n’a jamais disparu

Ă€ Salvador de Bahia, Ă  Recife, Ă  BelĂ©m… les cultes afro-brĂ©siliens comme le candomblĂ©, l’umbanda, ou les traditions indigènes rituelles longtemps persĂ©cutĂ©es reprennent une place visible et assumĂ©e dans l’espace public. Le Festival d’Iemanjá, cĂ©lĂ©bration dĂ©diĂ©e Ă  la dĂ©esse de la mer d’origine yoruba, a rĂ©cemment rassemblĂ© plus de deux millions de personnes, dans un climat mĂŞlant ferveur religieuse, expression culturelle et rĂ©sistance symbolique Ă  l’oppression monothĂ©iste.

Mais ce retour n’est pas un simple folklore remis au goût du jour. Il marque une revendication d’antériorité, une affirmation de souveraineté spirituelle contre la domination évangélique qui a envahi le Brésil depuis les années 1980, appuyée par les lobbys pentecôtistes liés au pouvoir.

🏛️ Une reconquête de terrain culturel, politique, anthropologique

Pendant des décennies, les cultes afro-indigènes ont été criminalisés, moqués, diffamées, ou relégués à la sphère du privé. Les églises évangéliques les ont souvent directement désignés comme sataniques, justifiant leur éviction par des campagnes violentes, parfois physiques, toujours symboliques.

Aujourd’hui, cette dynamique s’inverse localement :
– des gouverneurs réhabilitent des lieux de culte traditionnels,
– des lois protègent les terres spirituelles,
– les médias locaux traitent enfin ces cultes comme des faits sociaux légitimes, non comme des aberrations folkloriques.

Cette rĂ©habilitation n’est pas juste une renaissance culturelle, mais la levĂ©e de l’étouffement christo-totalitaire.

⚔️ Une bataille de représentations

Dans cette rĂ©surgence, Iemanjá, ExĂş, OxĂłssi sont des figures mythiques mais aussi des tĂŞtes de pont narratives, des noms-relais dans un espace de conflit symbolique. Ils ne s’opposent pas au christianisme abstraitement, mais incarnent une forme de cosmogonie plurielle, enracinĂ©e dans le vivant, les cycles, les forces naturelles, la transe, le chant, la mĂ©moire orale, l’Ă©ternelle rĂ©invention inspirĂ©e.

On ne parle donc pas seulement de “religion”, mais d’un mode d’être-au-monde, que le monopole moral évangélique a tenté d’effacer au nom d’une modernité univoque.

đź§­ Implications

Ce qui se joue là-bas résonne ici. Non pas dans les détails rituels, mais dans la logique profonde :

  • La rĂ©affirmation des traditions cosmologiques bannies par la religion dominante.
  • Le retour du sacrĂ© figuratif et pluriel, contre l’idĂ©ologie du “un seul dieu”, un seul sens, une seule parole.
  • La transformation des figures religieuses en actes de prĂ©sence publique.

Depuis que le monothĂ©isme a perdu son permis illimitĂ© de massacrer et de brĂ»ler toute divergence, la rĂ©version paĂŻenne n’est qu’une affaire de temps.

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